Appendice

APPENDICE

COMMENT «GRACIER» UN SAUMON
 

     De nos jours, un nombre grandissant de saumoniers décident de remettre vivants à l'eau des saumons qu'ils ont leurrés, plutôt que de les manger ou de les faire naturaliser. Ces sportifs préfèrent laisser les géniteurs se reproduire.
 
     Si vous désirez imiter ce geste, il vous faudra observer certaines règles de base. Soulignons, tout d'abord, que ce n'est pas au tout dernier instant qu'on décide de gracier un saumon (... lorsqu'on vient de se rendre compte qu'on a pris un madeleineau ...), mais avant de pêcher!
 
     Il conviendrait, au préalable, de limer ou d'écraser l'ardillon de votre hameçon, quoi que cela ne soit pas absolument nécessaire. D'autre part, si vous désirez remettre un saumon à l'eau et que vous remarquez, au cours du combat, que du sang s'échappe par ses branchies, il est indiqué de le garder. Un saumon qui saigne et qui est remis à l'eau risque fort d'être infecté et de mourir.
 
     De préférence, ne touchez pas au saumon; si vous devez le faire, ne lui touchez jamais avec les mains sèches : plongez les mains dans l'eau pour ne pas enlever le mucus qui recouvre Salar et qui le protège contre l'infection. N'insérez jamais vos doigts dans ses yeux ou ses branchies; les branchies sont très sensibles à l'infection, qui s'y propagerait avec une rapidité foudroyante.
 
     Pour enlever l'hameçon de la gueule du saumon, tenez d'une main le saumon par la queue et descendez votre autre main le long du bas de ligne jusqu'à ce que vous arriviez à la mouche (sans toucher la gueule du saumon) et décrochez la mouche. Rappelez-vous qu'il est toujours préférable de couper le monobrin et de laisser l'hameçon dans la gueule du saumon, si cet hameçon est piqué ailleurs qu'en périphérie de la gueule.

Remise à l'eau

REMISE À L'EAU
     Que vous pêchiez à pied ou d'une embarcation, ne lancez jamais violemment à l'eau le saumon que vous graciez.
 
     Tenez-le toujours dans l'eau par la queue, d'une main, le plus délicatement possible, et soutenez-le horizontalement, en plaçant l'autre main sous son abdomen; puis, en plaçant le saumon face au courant, l'eau circulera dans la gueule et les branchies pour qu'il s'oxygène bien de nouveau.
 
     En quelques secondes, il reprendra toute sa vigueur: vous verrez même des bulles d'air s'échapper de ses branchies. Il fuira, avec un violent coup de queue, pour retourner au plus profond de la fosse.
 
ATTENTION!
 
     Si vous remettez vivant à l'eau un saumon que vous venez de capturer, vous devez le comptabiliser dans votre limite de prises quotidienne! Vous devez cesser de pêcher lorsque cette limite est atteinte! C'est la conclusion à laquelle en arrive Me Michel DesRosiers, du Service juridique du ministère du Loisir, de le Chasse et de la Pêche, dans une analyse du 3 mai 1985, à la demande de Luc Forest, de la revue Atossement vôtre (revue de la Confrérie des pêcheurs à la mouche A.T.O.S.- Achigan, Truite, Omble et Saumon - du Québec); cette confrérie s'est toujours montrée favorable à la graciation des poissons par ses membres (c'est d'ailleurs cette confrérie qui a popularisé l'emploi des mots «gracier» et «graciation»). Me DesRosiers dit que son interprétation des règlements sur la pêche du saumon au Québec «l'oblige à conclure que l'on a voulu limiter le nombre de saumons capturés et ce, sans considérer le fait que ces poissons soient conservés ou remis à l'eau par le pêcheur.»
 
     Mais vous n'avez l'obligation d'apposer un scellé (étiquette de plastique), dans la queue du saumon, que si vous gardez le poisson capturé.
 
LA DOULEUR
 
     Les recherches sur la façon dont les saumons ressentent la douleur en sont à leurs premiers balbutiements. Si l'on s'en rapporte à des études qui ont porté sur d'autres espèces de poissons que les salmonidés, il faudrait conclure que les saumons ont un système nerveux assez développé pour leur permettre de faire la différence entre les choses agréables ou désagréables. Mais il apparaît certain que les saumons ne ressentent pas la douleur de la même façon et avec autant d'acuité que les humains.
 
     Est-ce que le saumon ressent la douleur, comme voudraient nous le faire croire certains soi-disant «défenseurs des pauvres petites bêtes sans défense» ? S'il la ressentait aussi vivement, est-ce qu'il viendrait mordre à votre mouche ... avec, accrochée dans la gueule, une mouche qu'il a arrachée à un saumonier pêchant avant vous (quelques heures auparavant ou bien la veille ou l'avant-veille ...)? Vous avez peut-être déjà vous-même vécu semblable expérience ou vous connaissez assurément d'autres saumoniers qui ont connu ce fait.
 
     Nous vous soulignons que Chapman Pincher, dans son livre A Study of Fish, relate le cas d'un requin qui, après avoir été éviscéré et rejeté à la mer, a été immédiatement recapturé ... en mordant à ses viscères servant d'appât!
 
     Pincher nous parle aussi d'une perchaude immédiatement recapturée ... son oeil arraché servant d'appât au pêcheur! Un espadon, après quelques heures de combat, se préoccupait de manger ... même s'il avait encore l'hameçon et l'appât dans sa gueule!
 
     Que les personnes opposées à la pêche cessent donc de faire de l'anthropomorphisme! Qu'elles arrêtent donc de nous rebattre les oreilles en prétendant que les pêcheurs font souffrir les poissons.

RÉGLEMENTATION RELATIVE À LA PÊCHE DU SAUMON

    L'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867 (à l'alinéa 12 de la partie 91) donne pleine et entière autorité au Parlement du Canada sur «les pêcheries côtières et celles à l'intérieur des terres».
 
     La première loi sur les pêcheries (commerciales et sportives) adoptée par le Parlement du Canada date du 22 mai 1868. Dans la partie 7 de cette loi de 1868, où l'on parle de la pêche du saumon atlantique ... en Ontario (!), on stipule que la saison de pêche (commerciale et sportive) va du 1 er mai au 31 juillet. Les législateurs prennent la peine de préciser que, dans le cas de la pêche sportive, il est interdit de pêcher autrement qu'à la mouche artificielle non plombée (with surface flies only) dans les fosses des rivières et des ruisseaux (in spawning pools).

    On peut donc constater que l'obligation de pêcher le saumon atlantique à la mouche ne date pas d'hier.
RÉGLEMENTATION RELATIVE À LA PÊCHE DU SAUMON
     Lors des périodes d'eaux basses, les saumons concentrés dans les fosses sont très vulnérables: l'utilisation de leurres métalliques permet de les « crocheter» avec une facilité tellement déconcertante que ça en devient criminel. L'eau des rivières à saumons est d'une limpidité telle, surtout en période d'étiage, qu'il est facile pour un braconnier de localiser les saumons et de les accrocher dans une partie quelconque du corps à l'aide d'un leurre métallique pesant. Le même danger subsiste pendant la période préparatoire à la fraie, alors que les saumons séjournent dans des eaux peu profondes et qu'ils sont plus insouciants des activités humaines se déroulant à proximité.

    Vous comprenez facilement que les saumons auraient disparu depuis belle heurette de nos rivières à saumons si l'utilisation du leurre métallique avait été généralement autorisée pour la pêche sportive. Vous comprenez aussi pourquoi l'emploi de mouches lestées n'est pas permis.
 
GROSSEUR DES HAMEÇONS
 
     Mais ce n'est que depuis le 1er avril 1969 que le Québec a réglementé la grosseur des hameçons utilisés pour le montage des mouches à saumons employées par les sportifs dans les rivières à saumons de la province. Léon Tremblay, de Sainte-Foy, qui était secrétaire général du Conseil supérieur du saumon du Québec à cette époque-là, nous a rappelé que c'est Paul Brown, alors sous-ministre en titre du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche (M.T.C.P.), qui avait proposé de réglementer la grosseur des hameçons.
 
     M. Brown, un ardent saumonier, s'était aperçu, au cours de ses excursions de pêche, que certains saumoniers, tout en respectant l'obligation de ne pêcher qu'à la mouche, utilisaient des mouches montées sur des hameçons aux proportions gigantesques et très pesants ... ce qui leur facilitait la pêche du saumon à la dandinette.
 
     La grosseur des hameçons sur lesquels sont montées les mouches à saumons, au Québec, a été déterminée d'après l'échelle de Redditch (cette échelle établit les normes de grosseur pour la fabrication des hameçons par les industriels de la ville de Redditch, en Angleterre).
 
     Dans les rivières à saumons, quelle que soit l'espèce de poissons qu'on y pêche, il est interdit d'utiliser une ligne plombée, de pêcher avec des engins de pêche conçus pour le lancer léger ou le lancer lourd, d'utiliser des appâts ou des leurres autres que des mouches artificielles et d'employer des mouches plombées.
 
     Il est interdit d'attacher plus d'une mouche artificielle au bas de ligne. Aucune mouche ne doit être montée sur un hameçon triple (ou l'équivalent) plus gros que no 6. Aucune mouche ne peut être garnie de plus de deux hameçons ou d'un hameçon double plus gros que no 2/0; par ailleurs, aucune mouche à saumons ne peut être montée sur un hameçon simple plus gros que no 5/0.
 
     Le Waddington Shank (hameçon articulé, dont nous vous avons déjà parlé) peut être employé dans le montage des mouches à saumons, puisque son utilisation n'est pas spécifiquement interdite.
 
     Les mouches en tandem (une seule mouche montée sur deux hameçons attachés l'un derrière l'autre, pourvu qu'aucun des deux hameçons ne soit plus gros que no 2/0), peuvent aussi être utilisées.
 
À LA CUILLER
 
     Il est permis de pêcher à la cuiller sur des portions bien spécifiques de certaines rivières (très peu nombreuses), à des périodes bien déterminées de la saison.
 
     Pourquoi? Parce que des pourvoyeurs et leur clientèle (surtout dans le Nouveau-Québec et le Grand Nord) ont fait pression auprès des autorités gouvernementales pour obtenir une telle permission. Il faut souligner que certaines rivières des régions septentrionales sont en réalité des fleuves: on n'y trouve pas de fosses, à proprement parler, et les saumons sont souvent répartis sur toute la longueur et toute la largeur des cours d'eau en question. Là-haut, les saumoniers pêchent surtout à la traîne et il y a bien peu de chances qu'ils «jiggent», même en pêchant au leurre métallique; il faut répéter que les sportifs prennent bien plus de truites mouchetées, de brochets, de truites grises, de ouananiches et d'ombles chevaliers que de saumons atlantiques, puisque des poissons de toutes ces espèces sont présents en grand nombre dans les cours d'eau en question.
 
     Mais est-ce tellement plus chanceux d'utiliser la cuiller, au lieu de la mouche artificielle, même dans ces rivières-là? Henri Poupart, de Montréal, qui fut éditeur de la revue mensuelle spécialisée «Québec Chasse & Pêche» (ancêtre de «Sentier Chasse-Pêche») a déjà vécu u ne expérience à ce sujet. Au début des années 1970, Pou part faisait partie d'un groupe de 12 pêcheurs fréquentant la rivière Whale (région de la baie d'Ungava), où il est permis de pêcher le saumon au lancer léger avant le 31 juillet. Dix sportifs ont pêché au lancer léger, pendant une semaine, alors que deux autres ne pêchaient qu'à la mouche artificielle: les pêcheurs à la mouche ont pris 37 saumons et ceux au lancer léger ... aucun!
 
     Le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche du Québec (M.L.E.P.) a prouvé indubitablement que les pêcheurs à la mouche artificielle étaient plus chanceux que les pêcheurs utilisant des leurres métalliques, à l'embouchure de la rivière Moïsie (au sud du pont de la route no 138) où la pêche au leurre métallique est permise depuis 1979.
 
     Nous vous rappelons que tout genre de pêche à la ligne, surtout pour la truite mouchetée et la truite de mer, est permis dans des portions bien déterminées de certaines rivières à saumons précises, à des moments spécifiques de la saison de pêche. Nous vous conseillons fortement de consulter attentivement, chaque année, le résumé des règlements spéciaux que les autorités gouvernementales publient à l'intention des saumoniers.
 
RÈGLEMENTS SPÉCIAUX
 
     Puisque le respect par les saumoniers des règlements spéciaux concernant la pêche du saumon est d'une importance capitale pour la survie de cette espèce, nous vous soulignons ici les principaux règlements, à part ceux déjà mentionnés plus haut à propos des mouches que vous pouvez utiliser légalement. Nous ne vous citons pas tous les règlements, ce qui serait fastidieux; sans compter qu'il y a des modifications annuellement.
 
     Depuis 1976, au Québec, vous devez vous procurer un permis annuel spécial pour récolter des saumons, que ce soit dans les rivières officielles ou non. Ce permis vous autorise à prendre une limite quotidienne (fixée selon la rivière fréquentée) et une limite annuelle de saumons (des scellés ou étiquettes vous sont remis en nombre suffisant, au moment de l'achat de votre permis spécial). Attention: si vous perdez votre permis de pêche du saumon, vous ne pourrez le faire remplacer ou en acheter un autre! I1 est interdit d'avoir en votre possession un saumon non étiqueté. Le scellé doit être apposé à la base de la queue du saumon immédiatement après sa capture, de la manière indiquée par le gouvernement. Il est interdit d'acheter, vendre, offrir en vente ou même échanger un saumon pris sportivement à la ligne.
 
     Pour des motifs de conservation, il vous est permis de remettre à l'eau un saumon vivant; dans ce cas, vous devrez compter ce saumon dans votre limite quotidienne des prises et cesser de pêcher lorsque cette limite sera atteinte! Vous devrez obligatoirement remettre vivant à l'eau tout saumon mesurant moins de 30cm (12 po).
 
     Dans une rivière à saumons, il vous est interdit de pêcher entre une heure après le coucher du soleil et une heure avant son lever. Il vous est interdit, sans excuse légitime, le long des rives d'une rivière à saumons ou à moins de 90 m (300 pi), d'avoir en votre possession des engins de pêche dont l'usage n'est pas permis pour la pêche du saumon dans cette rivière. Il vous est interdit de pêcher à partir de tout pont qui traverse une rivière à saumons ou son estuaire. La pêche du saumon en embarcation est strictement réglementée, là où elle est permise.
 
     Évidemment, la saison de pêche est spécifique à chaque région, de même que la limite de prises quotidiennes. Nous ne vous le répéterons jamais assez: consultez attentivement, chaque année, le résumé des règlements publié par le gouvernement à ce sujet.
 
     Saviez-vous qu'au début des années 1950, il était permis de prendre cinq saumons par jour et 21 par semaine dans les rivières à saumons du Québec? Revivrez-vous, un jour, pareille abondance? Aux gouvernants et à vous de décider, en protégeant cette ressource naturelle inestimable!

le braconnage

     La lutte contre le braconnage, c'est l'affaire de tous les citoyens, parce qu'ils se font voler tout rond par des criminels de la faune.
 
     Les chasseurs et pêcheurs sportifs investissent des sommes considérables dans l'achat d'équipement, de vêtements, de véhicules, de permis, de repas, de chambres d'hôtel, etc. Or, cet argent est bien souvent jeté à l'eau, surtout si les braconniers sont passés par là avant les sportifs!
 
     Le braconnage fait fuir les touristes, pêcheurs, observateurs de la faune. Autant d'emplois et de revenus perdus dans le secteur manufacturier, dans le domaine de l'hôtellerie et de la restauration, ainsi que dans celui des services (guides, essence, boutiques spécialisées, etc.).
 
     Pendant ce temps-là, le citoyen paie la facture pour la gestion, l'aménagement, la protection de la faune et... la répression du braconnage!
 
     Le gouvernement se voit forcé de prendre des mesures draconiennes pour limiter les dégâts: rivières à saumons fermées, saisons de pêche écourtées, limites de prises et de possession diminuées, coût des permis et des droits d'accès quotidiens haussé, etc. À cause des braconniers, les chasseurs et pêcheurs véritablement sportifs sont pénalisés.
 
     Mais pourquoi vous laisseriez-vous toujours «manger la laine sur le dos» par les braconniers, qui sont souvent bien connus dans votre milieu?
 
     Le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche du Québec met à la disposition de tous les citoyens un réseau téléphonique gratuit destiné exclusivement à signaler des actes de braconnage. C'est le S.O.S. Braconnage. Si vous êtes témoin d'un acte de braconnage, composez, sans frais d'appel interurbain, le 1-800-463-2191. Une personne sera au bout du fil pour vous répondre, à toute heure du jour ou de la nuit, sept jours sur sept. Votre plainte sera immédiatement transmise à un agent de conservation de la faune en patrouille, qui agira rapidement pour réprimer les crimes en cours et conduire les criminels de la faune devant les tribunaux. Les renseignements que vous communiquerez, ainsi que votre identité, seront tenus confidentiels.
 
     Les lois prévoient maintenant que les juges doivent imposer de très fortes amendes aux braconniers reconnus coupables, afin de leur enlever toute intention de récidive.
 
     Les braconniers vous volent et vous empêchent de vous adonner à votre activité de pêche favorite. Ces criminels sapent l'industrie touristique dans des régions économiquement défavorisées. Ce n'est pas en vous croisant les bras, en vous fermant les yeux et en gardant le silence que vous vous débarrasserez de ces criminels!
 
     Lorsqu'on parle du braconnage du saumon, il ne faut pas penser seulement aux criminels qui «jiggent» le saumon à la cuiller dans les fosses ou qui passent le filet dans ces mêmes fosses durant la nuit. Les braconniers, ce sont aussi des pêcheurs commerciaux et autochtones qui prennent illégalement des saumons au filet; ce sont des pêcheurs commerciaux qui tendent expressément leurs fascines sur les routes de migration des saumons; ce sont des pêcheurs commerciaux qui font des prises dites « accidentelles» (alors qu'ils devraient normalement savoir que la morue ne se prend pas dans des filets posés en surface et près de la berge!...). Ces braconniers là, il faut les dénoncer aux autorités avec d'autant plus de vigueur que les dommages qu'ils causent sont plus grands.

COMPORTEMENT DU SAUMONIER DANS LES FOSSES

    Il faut que les milliers de pêcheurs à la mouche s'entendent bien entre eux sur la manière dont ils doivent se comporter dans les fosses des rivières, s'ils veulent connaître une expérience de vie en plein air qui aura une certaine qualité.
 
     Le système dit de la rotation est essentiel lorsque plusieurs saumoniers pêchent dans une même fosse, afin que chaque pêcheur puisse tenter sa chance. La rotation des saumoniers dans une fosse est une excellente façon de lier connaissance avec de bons pêcheurs à la mouche, de parfaire votre technique et de vous faire de nouveaux amis précieux ... tout en évitant les querelles et les accidents!
 
     Vous devrez prendre votre rang dans le groupe de pêcheurs qui désirent pêcher dans une fosse. Vous vous placerez derrière celui qui est au départ (à la tête de la fosse); lorsque viendra votre tour de commencer à lancer, vous ferez une douzaine de lancers, en allongeant votre soie à chaque lancer. Puis, vous avancerez ensuite (en direction de la queue de la fosse) en faisant un pas après un ou deux lancers. Le pêcheur qui vous suit fera de même, ainsi que tous ceux qui le suivent; le pêcheur qui vous précède agira de la même manière, ainsi que tous ceux qui le précèdent. Les pêcheurs devront garder une distance normale et raisonnable entre eux, pour éviter des accidents et pour conserver un minimum de chances de succès.
 
     Si un saumon lève en direction de votre mouche, mais sans la prendre, vous avertirez les autres pêcheurs de la chaîne. Vous aurez alors le loisir de faire un arrêt, le temps de changer de mouche et de faire une dizaine de lancers; vous ne perdrez pas votre place dans la chaîne des pêcheurs et le système suivra son cours normal après cet arrêt exceptionnel.
 
     Si le saumon prend votre mouche, les autres pêcheurs devront retirer immédiatement leur soie de l'eau et demeurer à leur place (sur la berge) pour ne pas entraver vos efforts. Si vous perdez le saumon, durant le combat, la rotation continuera, sans que personne ne perde sa place.
 
     Si vous pêchez à la mouche sèche, vous devrez quand même prendre votre rang parmi les pêcheurs qui désirent pêcher dans la même fosse et faire la rotation avec eux (au lieu d'aller vous placer en queue de fosse et de remonter le courant vers la tête de la fosse, comme vous devriez le faire normalement en pêchant à la mouche sèche). Mais, prenez garde: ne lancez pas votre mouche sèche trop loin vers l'amont (la tête de la fosse) et ne la laissez pas dériver trop longuement dans le courant, car vous pourriez nuire à vos voisins pêchant à la mouche noyée.
 
     Retenez la règle d'or suivante: traitez vos confrères saurnoniers pêchant dans la même fosse que vous, comme vous voudriez qu'ils vous traitent!
 
     Si l'un de ces pêcheurs ne sait pas comment faire la rotation ou refuse de participer au système, mettez-vous à plusieurs pour le lui expliquer: il comprendra peut-être alors plus ... facilement ... qu'il est le seul à avoir le pas dans l'armée! Et tous les saumoniers se soumettront au même système sur toutes les fosses de toutes les rivières à saumons, ce qui sera bien plus agréable pour l'ensemble de la confrérie.
 
     Pour ceux qui se demanderaient encore s'il y a avantage à faire la rotation dans les fosses, laissez-nous vous raconter une aventure vécue par André Boucher, de Charlesbourg, alors qu'il pêchait dans la fosse Du Barrage de la rivière Grande-Trinité, sur la Côte-Nord, voilà quelques années. C'était quelque temps après le déclubbage de la rivière et les pêcheurs sportifs fréquentant alors la Grande-Trinité avaient la mauvaise habitude de se stationner au même endroit, sans bouger, pendant des heures et des heures de suite. Lorsque André est arrivé à la fosse, cette journée-là, il y avait déjà trois pêcheurs à la tête de la fosse, qui refusaient systématiquement de bouger des roches sur lesquelles ils se tenaient. André a décidé de ne pas s'obstiner et il s'est dirigé vers la queue de la fosse, où il s'est mis à lancer. Avec une quinzaine de lancers, il a pris trois saumons (pesant entre 1,6 et 3,6 kg- entre 3 lb et demie et 8 lb) ... au nez des trois autres moucheux, qui voulaient maintenant pêcher à la queue de la fosse!

LES CANOTEURS ET LES SAUMONIERS SUR LES RIVIÈRES

     Au Québec, le nombre des rivières à saumons facilement accessibles au «monde ordinaire» est relativement limité: moins de quatre douzaines de rivières, alors que les adeptes de la pêche à la mouche désireux de les fréquenter se comptent par dizaines de milliers et que le nombre des saumoniers croît constamment. Et, pour pêcher dans les rivières qui leur sont accessibles, les saumoniers paient souvent assez cher. .. lorsqu'ils réussissent enfin à obtenir la réservation de leur choix!
​LES CANOTEURS ET LES SAUMONIERS SUR LES RIVIÈRES
     On comprend la colère des saumoniers lorsque des canoteurs, bien intentionnés mais mal informés, viennent bousiller une journée de pêche obtenue de peine et de misère et préparée pendant de longs mois. Les canoteurs n'ont aucune réservation à obtenir et ne déboursent aucun droit d'accès pour descendre une rivière.
 
     Les saumoniers ne s'opposent pas à la présence des adeptes du canotage sur les rivières à saumons, mais ils souhaitent ardemment que les canoteurs respectent un minimum de contraintes, qui seraient fort loin d'être aussi sévères que celles que l'on impose aux pêcheurs sportifs.
 
     L'harmonisation des relations entre les saumoniers et les canoteurs passe par une expérience tentée, à partir de 1985, sur la rivière Sainte-Marguerite (située sur la rive nord du Saguenay, au nord de Sacré-Coeur et de Tadoussac). En effet, l'Association de la rivière Sainte-Marguerite Inc., qui gère bénévolement la ZEC Sainte-Marguerite pour le compte du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche (M.L.C.P.), demande aux adeptes du canot-camping et de la descente de rivières de respecter un certain comportement.
 
     Lorsque les adeptes de la descente de rivières mettent leurs canots à l'eau, les responsables de la ZEC Sainte-Marguerite leur remettent un dépliant expliquant comment ils doivent se comporter pour ne pas nuire aux saumons et aux pêcheurs sportifs. Ce dépliant, qui contient un plan sommaire de la rivière, montre les panneaux de signalisation que les adeptes du canotage retrouveront sur leur parcours.
 
     Des panneaux annoncent les fosses (100 et 50 m avant d'y arriver). Ces panneaux indiquent s'il faut passer à droite ou à gauche dans la rivière, s'il y a du danger plus loin, si l'on peut camper, etc.
 
     Cette signalisation a pour but d'éviter les hostilités connues antérieurement entre les saumoniers et les canoteurs. Car, lorsque les canoteurs passent au mauvais endroit d'une fosse (c'est-à-dire au-dessus des saumons), les saumons sont dérangés pendant une bonne période de temps, ce qui cause un état de frustration extrême chez les saumoniers et provoque des excès de colère.

les précipitations acides

LES PRÉCIPITATIONS ACIDES
     S'il est un sujet qui inspire des craintes aux adeptes de la pêche à la ligne, depuis le début des années 1970 (alors qu'il est devenu à la mode), c'est bien celui des précipitations acides. Car, depuis cette époque, nombreux ont été les témoignages des scientifiques à propos des dommages graves causés à l'environnement et au patrimoine faunique par la pluie, la neige, la neige fondante et la grêle transportant avec elles des oxydes de soufre et des oxydes d'azote transformés en acide sulfurique et en acide nitrique.
 
    Les recherches des dernières décennies ont prouvé que la majeure partie de l'est du Canada est sensible aux précipitations acides, puisque le sol de ces régions ne possède pas la capacité naturelle de neutraliser ou d'absorber les acides.
 
     Au début de 1987, des porte-parole officiels d'Environnement Canada admettaient que quelque 14000 lacs de l'est du Canada étaient acidifiés; 28 pour 1 00 des lacs du Québec étaient acidifiés. Dans Charlevoix, où les scientifiques ont trouvé beaucoup de lacs acidifiés, on a fait des tentatives de réintroduction de salmonidés: les poissons ont tout simplement crevé ...
 
     Quelle influence ces précipitations acides peuvent-elles avoir sur le saumon atlantique? Désastreuse! Surtout dans le cas des rivières à saumons débouchant sur la rive nord du Saint-Laurent (de la frontière avec l'Ontario jusqu'au Labrador), ainsi que celles débouchant sur la rive sud du fleuve (jusqu'à la péninsule gaspésienne). Dans le cas des rivières à saumons de la Gaspésie, il est admis que le sol alcalin peut contrebalancer les effets néfastes des précipitations acides, tout comme cela survient dans le cas des rivières de l'île d'Anticosti et de la baie d'Ungava. Mais, jusqu'à quand?
 
     Les saumoniers, s'ils veulent continuer de s'adonner encore pendant longtemps à leur douce passion, doivent, de toute évidence, exercer de fortes pressions sur les politiciens pour qu'ils adoptent rapidement des mesures de nature à mettre un terme à ce fléau des précipitations acides.

Prises record

    Le plus gros saumon anadrome de l'Atlantique pris à la ligne et à la mouche, dans la province de Québec et au Canada, pesait 26,1 kg (55 Ib 8 oz). Cette prise, confirmée par des documents officiels, fut faite par Esmund B. Martin, le 27 juin 1939, dans la rivière Grande-Cascapédia (Gaspé-Sud).
 
     Le précédent record était un saumon de 24,5 kg (54Ib), pris par R. G. Dun, le 29 juin 1886, sur. .. la rivière Grande-Cascapédia également!
 
     Au début des années 1980, toujours dans la même rivière, un braconnier a pris un saumon de 26,7 kg (59 lbl: mais, comme la prise était illégale, on n'a pas voulu la compter comme un record officiel.
 
     Un certain A.K. Sioane aurait pris à la mouche un saumon pesant 33,6 kg (74 lb) dans la rivière Romaine (Côte-Nord), selon William Kendall (Fishes of New England), publié à Boston en 1935. Mais cette prise n'a jamais été confirmée par des documents officiels.
 
     Le record mondial pour la pêche du saumon à la mouche est de 35,9 kg (79 Ib 2 oz). Le saumon fut pris par Henrik Henriksen, en 1928, dans la rivière Tana, à la frontière de la Finlande et de la Norvège.
 
     De nos jours, dans le domaine de la pêche du saumon à la mouche artificielle, il existe une multitude de records: le record de la saison, le record de la rivière, le record pour une prise faite avec un bas de ligne d'une résistance de 1,8 kg (4 lb), de 2,7 kg (6 lb), etc. Vous nous pardonnerez de ne pas nous arrêter à ces détails.
 
     Mais nous vous soulignons que le plus gros saumon anadrome de l'Atlantique capturé par l'homme et dont il est fait mention dans des documents officiels pesait 46,7 kg (103 Ib) ; il a été pris, en 1901, par des braconniers dans la rivière Devon, en Écosse.
 
     Si vous croyez avoir abattu l'un de ces records, empressez-vous de le faire savoir ... en étayant vos affirmations par des documents officiels irréfutables!
 
OUANANICHE
 
     Le record canadien de poids pour une ouananiche est de 9,7 kg (21 Ib 6 oz); la prise fut faite dans le lac Tremblant (nord de Montréal), le 18 mai 1982, par Guy-Daniel Lefebvre, un citoyen du lac Maskinongé à Saint-Jovite. Jusqu'à ce jour-là, le record canadien pour la ouananiche était de 8,9 kg (19 Ib 10 oz) et avait été pris, quelques années auparavant, dans le même lac Tremblant, par Mike Rouday, de Montréal.
 
     Le record nord-américain est une ouananiche pesant 10,2 kg (22 1b 8 oz) capturée par Edward Blakely dans le lac Sebago (État américain du Maine), le 1er août 1907.
 
     Quant au record mondial de poids pour un poisson de cette espèce, il est représenté par une ouananiche de 12,9 kg (28 1b 7 oz), prise dans le lac Iso-Saimaa de Finlande, le 10 septembre 1905. En 1883, une ouananiche pesant 11,34 kg (25 lb) avait été prise dans le lac Vener de Suède.

FUMAGE DU SAUMON «À LA F. DE B. GOURDEAU»

     François de B. Gourdeau était un gastronome. Lorsqu'il nous recevait dans sa maison historique de Cap-Santé (Portneuf), il ne manquait jamais de nous faire goûter, avant les copieux repas qu`il préparait lui-même, quelques tranches de saumon fumé. Quel délice! Nous en avons les papilles gustatives encore tout émues…

     Comme en toute chose, François était minutieux, méticuleux: il avait inventé sa propre recette de fumage à froid de la chair du saumon, après avoir tenté  moult expériences dans ce domaine.

     François nous a raconté, à quelques reprises, que les Assyriens, les Chaldéens et les Égyptiens savaient déjà fumer le poisson. Mais ce n`est pas avant le XVIe siècle que cet usage s'est rependu en Europe. D'après François, la fumaison du poisson (qu'on appelait le «boucanage» dans ce temps-là) semble avoir été apprise des Amérindiens par les Européens, au moment de la découverte de l'Amérique; antérieurement, les Européens ne se contentaient que de saler et sécher le poisson, ce qu'ils pratiquent encore.

     Le boucanage à fumé chaude, au-dessus d'un feu ouvert, constitue le procédé de fumage le plus ancien. Il est encore pratiqué, de nos jours, par les Montagnais et les Cris du Québec pour conserver le touladi (truite grise), le poisson blanc (corégone) ou tout poisson à chaire grasse. Mais le poisson fumé à chaud ne se conserve pas trop longtemps, surtout s'il est fumé durant l'été; on peut toutefois le conserver pendant plusieurs mois en le faisant mariner dans une saumure très dense.

     Le procédé de fumage rapide, tel qu'employé dans le commerce, consiste à faire tremper les filets de poissons dans une saumure et à les placer presque immédiatement dans le fumoir. Les Indiens n'ont jamais traité le poisson dans la saumure avant de le faire fumer: ils ne connaissaient ni le sel ni le salpêtre, encore moins les aromates.

    Le procédé de fumage à froid, aux aromates, est maintenant presque le seul employé en Gaspésie, pour la fumaison de la chair du saumon. Ce procédé, qui constitue le choix des gastronomes, communique un goût très délicat à la chair du poisson; de plus, le saumon fumé à froid se conserve très bien (au réfrigérateur) et il est même possible de le faire congeler pour de longues périodes de temps (de 8 à 10 mois).

     Avant de faire fumer les filets, il est essentiel de les traiter dans une saumure aromatisée. Voici les ingrédients que François recommandait pour traiter 8 filets de saumons (4 saumons pesant de 3,6 kg à 5,4 kg - 8 à 12 lb chacun):

 - 10 pintes d'eau (11,5 litres)
 - 1 bouteille de vin blanc sec (750 ml)
 - 3lb et demie de cassonnade (1,6 kg)
 - 7 lb de gros sel (3,2 kg)
 - 2 cuillerées à soupe de poivre entier
 - Un concombre vert, coupé en quatre sur la longueur
 - Un quart de tasse d`épices à marinades
 - 2 oz et demie de salpêtre (70,8 g)
 - 6 feuilles de lauriers
 - 4 cuillerées à  soupe de moutarde sèche.

    NOTE : le salpêtre est un sel cristallin, inodore et légèrement amer. On l'utilise surtout en salaison et en charcuterie, parce qu'il confère à la viande et à la chair de poisson une appétissante couleur rougeâtre.

     Vous mijotez le tout jusqu`à ce que le sel soit dissous et vous laissez refroidir. Vous déposez les filets (sans enlever la peau) dans la saumure et vous les laissez tremper pendant 12 heures, en prenant soin de les retourner de temps à autre afin de les empêcher de coller ensemble. Après avoir retiré les filets de la saumure, il faut les laisser égoûter et sécher au soleil (à l'abri des mouches) pendant quelques heures. Ensuite, vous badigeonnez les filets de gros rhum (noir) avec un pinceau à pâtisserie et vous laissez sécher pendant 30 minutes; puis, vous badigeonnez avec de l'huile végétale (huile de maïs ou huile d'arachide). Vient le temps de faire fumer les filets, pendant quatre à cinq jours (jour et nuit!).

     Vous attachez la partie inférieure du filet de saumon (près de la queue) avec deux languettes de bois et vous suspendez dans le fumoir avec un crochet solide. Vous pouvez aussi mettre les filets sur un grillage, mais ce procédé comporte certains inconvénients: la chair du saumon reste marquée par le grillage et vous aurez, de plus, de la difficulté à obtenir un séchage complet. La chaleur dessèchera rapidement le côté du filet placé à plat sur le grillage et empêchera les vapeurs de fumée de pénétrer dans le fumoir jusqu'en haut.

     Construire un fumoir! Rien de plus simple! Un carré de 91 sur 91cm, de 213 cm de hauteur, à l'avant, et de 183 cm de hauteur, l'arrière (3 sur 3pi, de 7 pi de hauteur, à l'avant, et de 6 pi de hauteur, à l'arrière). Percez quatre trous de 2,5 cm (1po) de diamètre, sur les quatre murs (pour laisser échapper la fumée); masquez ces orifices avec un grillage très fin (broche à moustiquaire). Vous pouvez aménager un fumoir avec un réfrigérateur désaffecté. Le tuyau reliant le feu au fumoir devra être enfoui au moins 15 cm (6po) sous terre et il devra être d'une longueur d'au moins 2,4 ou 3m (8 ou 10pi). Pour faire le feu, utilisez un petit poêle à bois. Faire un peu de copeaux de bois, puis alimentez avec de la sciure de bois dense (érable, frêne, bouleau, etc,); n'utilisez pas de bois résineux, car votre saumon aura un goût gommeux et désagréable.

     François nous rappelait souvent que le saumon fumé est précieux et qu'il coûte cher, surtout lorsqu'on a fait le voyage pour aller le pêcher soi-même en rivière. Il faut donc s'organiser pour le faire durer le plus longtemps possible. On ne doit pas le trancher à l'avance, car il se dessèche très rapidement; il est préférable d'en trancher uniquement  lorsqu'on veut le goûter (à l'aide d'un couteau non dentelé: une fine lame, du genre de celle d'un couteau à fileter le poisson, ferait bien l'affaire).

     François nous offrait son saumon fumé en hors-d'œuvre ou comme entrée, après le potage. Dans les grands restaurants, on sert généralement le saumon fumé en escalopes (tranches très minces), accompagner d'huile d'olive, de câpres, de poivre frais moulu, de tranches d'oignons très minces et d'un filet de jus de citron. On peut le servir aussi avec du concombre à la crème sure. François conservait les rognures de saumon fumé pour en faire, le lendemain, une excellente garniture pour une omelettre «baveuse».
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