Que peut-il se passer en Gaspésie en 11 jours ?

      26 juillet 1989 - Je reçois un appel de Louise Bérubé de Montréal qui souhaiterait faire connaissance avec la rivière Grande-Rivière. J'avais rencontré Louise au dernier congrès de la FQSA et lui avait vanté la beauté et la générosité de la rivière.

     27juillet 1989 - Nous nous présentons à la barrière d'enregistrement où quatre pêcheurs locaux, plutôt loquaces en cette belle journée qui s'annonce ensoleillée, discutent saumon bien sûr, et semble se réjouir qu'une femme les accompagne aujourd'hui.

     En nous rendant au secteur 4 de la rivière, j'indique quelques fosses potentielles à Louise; nous arrivons enfin à la fosse « Grande Malbaie » dont environ 70 saumons ont pris possession. La fosse étant occupée, je propose à Louise d'aller un peu plus bas où se prélassent une quinzaine de saumons. Je lui indique où elle peut débuter et lui demande ce qu'elle a choisi de mettre à son bas de ligne. Une « green butt » double #12 avec un 6 livres test, me répond-elle. Je lui annonce aussitôt qu'elle aura de l'action très bientôt. Quelques minutes s'écoulent et « vlan », la mouche est happée vigoureusement et le combat s'engage. Après quelques sauts de Salmo Salar, des manoeuvres habiles et expertes de Louise et près de quinze minutes d'exaltation, guide compris, un saumon de 11 livres vient couronner ce très court baptême de Louise sur la Grande-Rivière.

     31 juillet 1989 - Un appel téléphonique de Serge Levasseur me demandant des possibilités de pêcher le lendemain. Suite à ma réponse affirmative, d'un commun accord, nous nous donnons rendez-vous.

     1er août 1989 - Tôt ce matin-là, toute la famille est là. Serge, avare de ses étiquettes, préfère être le superviseur technique pour sa charmante épouse Geneviève Campagna et c'est elle qui aura le plaisir d'être initiée sur la Grande-Rivière. Pour ceux et celles qui connaissent notre indispensable et très dévouée directrice générale, imaginez son sourire radieux à la vue de ce beau coin de pays qu'elle découvre pour la première fois.

     Secteur 4, fosse « Grande Malbaie » (encore) où quelques pêcheurs sont déjà installés; je conseille à Geneviève de débuter cette journée un peu plus bas où reposent encore plusieurs salmonidés. A notre arrivée, mon ami Hugues Lelièvre, subissant les symptômes d'une « saumonnite aigüe », est au prise avec un grilse et nous annonce qu'il vient tout juste d'en perdre un auparavant; cette fois-ci, le grilse n'échappera pas au pêcheur averti. Geneviève s'installe à son tour après que son aviseur technique préféré lui ait conseillé une « blue charm » (encore une journée qui s'annonce très courte) ; peu de temps après c'est parti! Un combat court mais combien « adrénalisant » se termine par une victoire de Geneviève, aidée par ses deux charmants enfants. Toute la galerie y était quoi...

     Cette courte rencontre avec Geneviève et Serge sera reprise le lendemain car notre directrice générale a une réservation dans le secteur B de la Bonaven ture et moi aussi. Quelle chance car je connais moins bien cette rivière, ne l'ayant fréquenté qu'à deux occasions.

     2 août 1989 - Bonaventure me voici. Serge, qui sera guide aujourd'hui, nous conseille « Salmon Pool ». Nous y descendons allègrement les cent marches et Geneviève y fait sa première passe, sans aucune touche. Je débute avec un streamer de mon cru, la « David Spéciale »; l'action ne se fait pas attendre mais se solde par la victoire de Salmo. Bravo, la journée a bien commencé et n'en sera que plus belle. La température est à la hausse; l'action n'y est plus. En fin de matinée, notre ami commun Paul-Etienne Poirier s'amène et nous confirme que plus de 165 saumons ont été dénombrés dans cette fosse, la veille. Nous nous en doutions car de nombreux spécimens, au cours de la journée, se sont donnés en spectacle.

     Après s'être ravitaillés et avoir conservé nos forces pour la pêche du soir, nous reprenons nos activités en fin d'après-midi; deux attaques à la sèche sans succès. Vers 8 heures, Geneviève ayant terminé sa journée, je me prépare pour une dernière passe et j'attaque avec confiance cette partie du jour que j'affectionne particulièrement avec une « Undertaker » # 8 simple. Quelques lancers s'effectuent et soudainement le saumon gobe la mouche et déploie aussitôt toute son énergie, livrant un combat presque nocturne de plus de dix minutes, pour enfin se rendre avec ses 11 livres. Merci à Serge et surtout à Geneviève pour sa générosité et son beau sourire.

     5 août 1989 - Je suis invité par mon ami Jules Quesnel qui a une réservation d'hiver au secteur 5 sur la Grande-Rivière. Malheureusement pour lui, aucun saumon à son actif, il aimerait bien utiliser une étiquette bleue. Son moral est bon, il est jovial et loquace.

     Arrivés au «Paisible», une fine brume s'est répandue sur la rivière, rendant féerique ce coin enchanteur. Jules tentera sa chance avec plusieurs mouches sans aucune touche. J'effectue une première passe, « blue charm » # 10 et une dizaine de lancers suffisent à piquer un grilse qui se décroche au bout de deux minutes.

     Tôt en début d'après-midi, nous explorons le « Renard » et Jules lève deux saumons mais Salar ne prend pas la mouche. Je me résigne, hum... à faire un essai rapide avec un « Muddler » #12 double et le résultat ne se fait pas attendre: vingt minutes de plaisir et l'aide de Jules couronnent avec succès la capture d'un argenté de 12 livres.

     Ma journée de pêcheur est terminée, mais point celle du guide. La journée s'achève et nous décidons de la terminer à la « Roche ronde ». Plusieurs saumons s'y reposent et le crépuscule fait bien tôt son apparition. Il est 8 heures et quelques poussières; ayant vanté toute la journée les avantages de moucher avec un avançon d'au moins une douzaine de pieds, je lui en prépare un et je constate que le moral de mon « client » est comme la température: à la baisse. J'y attache une « Blue charm » # 10 mais heureusement (pour Jules) cette mouche n'ira jamais à l'eau: quelques faux lancers et elle termine sa courte histoire dans un arbre perpendiculaire à la rivière. Je choisis donc en toute hâte une « Green machine » # 8 double et je m'aperçois que son bas de ligne (ce qui en restait) est réduit à 70 cm environ (confirmé par la suite). Je lui dit que de toute façon, il commence à faire noir et qu'il est « dû ». Quelle ne fût pas ma surprise au bout de quelques minutes d'entendre crier « j'en ai un ». Un grilse vient terminer ses jours dans la puise et enfin la température, pardon, le moral est la hausse. Quel plaisir il a eu à placer sa première étiquette, non sans difficulté toutefois.

     6 août 1989 - Jules, un peu fatigué de la veille mais combien confiant, est accompagné de sa charmante épouse Adrienne, au secteur 3. Après quelques essais à la « Grande fosse » et au « Bruce », sa persévérance est récompensée et le couple se réjouit à la capture de deux saumons de 8 et 10 livres.

     Que de souvenirs et de bons moments passés en bonne compagnie dans ces beaux coins méconnus de la Gaspésie! Et quelle richesse Salmo Salar nous donne en partage!

P.S. : A mon ami Claude Quimper de Pointe-aux-Pères, qui a capturé son premier saumon (18 livres) en trois lancers seulement le 23 juin dernier, je dis: ma mission est accomplie! J'ai réussi à te donner la piqûre et tu sais maintenant quelles sensations tu peux éprouver.

     Merci à Louise, Geneviève, Serge, Jules et tous les autres qui ont partagé ces moments inoubliables tout au cours de l'été 1989 et je souhaite à tous la plus belle année en 1990.

référence

» Par Michel Tremblay
» Photo Serge Levasseur
» Salmo Salar #19, Hiver, Février 1990.
Page 18 sur 25