Serait-elle encore meilleure que la Muddler ? par Jacques Gérome

L’EXTRAORDINAIRE HORNBERG

     Une mouche tout usage, une seule mouche artificielle qui pourrait prendre tous les poissons du Québec; une mouche n'imitant rien en particulier mais qui ressemblerait étrangement à toute une gamme d'insectes aquatiques, en plus d'imiter plusieurs vairons trouvés dans nos lacs et rivières, vraiment là, ce serait la mouche-miracle du siècle.

     Mais non, je ne parle aucunement de la Muddler Minnow qui, on le sait bien, a pris sa large part de poissons, mais d'une artificielle moins bien connue, n'ayant pas eu l'énorme publicité de la Muddler Minnow et qui est pourtant si productive pour toutes les espèces de poissons vivant ici au Québec. Qu'il s'agisse de truites, saumons, achigans, dorés, brochets, perchaudes, etc., tous ces poissons furent déjà leurrés par cette magnifique artificielle qu’est la HORNBERG.

Inventée il y a environ une trentaine d'années par un dénommé Frank Hornberg, agent de conservation américain, cette imitation avait pour but principal d'imiter un vairon et était montée sur de longs hameçons à mouche-vairon (Streamer). Depuis, nos voisins du sud, principalement ceux de la Nouvelle-Angleterre qui, soit disant, ont à peu près les mêmes conditions de pêche que nous, la façonnèrent en modèle noyée afin de couvrir les éclosions fréquentes de phryganes (Caddis) qui se produisent dans leurs cours d'eau. Elle fut perfectionnée plus tard encore par l'addition d'une collerette (hackle) assez fournie qui lui permettait de flotter.

     L'avantage premier de cette artificielle, c'est qu'elle s'utilise aussi bien sèche que noyée. Je m'explique: en petit format et sèche, cette Hornberg imite à la quasi-perfection une phrygane fraîche éclose qui se repose quelques secondes à la surface, et on l'utilise de la même qu'une mouche sèche de modèle régulier. Si cette présentation ne provoque aucune réaction du poisson convoité, on rentre l'artificielle par petites secousses. Sèche et doucement posée sur l'eau, elle imite ainsi une des nombreuses espèces de phryganes abondamment réparties au Québec. Semi-noyée, elle représente cette même phrygane lors de la ponte des œufs ou qui, pour une raison quelconque, se trouve à cet endroit. Lorsque cette artificielle est ramenée vers soi par petites secousses, vous remarquerez aussi qu'elle ressemble étrangement à un petit vairon.

     Ces méthodes s'appliquent aussi bien en lacs qu'en rivières.
 
     Montée en mouche-vairon (streamer et présentée en profondeur avec une soie entièrement callante, elle peut représenter nombre de vairons habitant nos cours d'eau; il s'agit seulement de lui donner l'action nécessaire.

     Dépendamment aussi des eaux fréquentées, une soie flottante à bout calant peut aussi bien faire l'affaire. L'imitation en mouche-vairon me sert assez bien alors qu'il y a éclosion de très grosses éphémères, lors des montées des poissons, particulièrement des truites. Si vous n'avez pas l'imitation exacte à portée de la main, lancez cette Hornberg dans les ronds de gobages tout en lui imprimant un léger mouvement, afin d'imiter cette grosse nymphe tentant de se débarrasser de son enveloppe; vous verrez, c'est mortel.

     Les insectes adultes des catégories libellules et demoiselles qui, après leur ponte, viennent mourir sur votre plan d'eau et qui font les délices d'achigans ou de truites, sont très bien représentés par une Hornberg vairon bien graissée. Il y a certainement bien d'autres manières d'utiliser cette artificielle; d'ailleurs, n'est-ce pas un des plaisirs de la pêche d'essayer toutes sortes de méthodes pour leurrer les poissons? Je suis certain que vos petits secrets personnels appliqués à la présentation de cette mouche vous rapporteront des succès.

     Pour ceux qui montent leurs mouches artificielles eux-mêmes, le bouquin de mon feu ami Serge J. Vincent, intitulé «La Mouche» illustre très bien le procédé à suivre pour monter cette Hornberg. Ceux qui, comme moi, n'ont pas le temps ou la patience de monter leurs artificielles, connaissent certainement un bon monteur qui en fabriquera. Personnellement, c'est Gérard Sylvestre de la rue Principale à St- Agapit dans le comté de Lotbinière qui me fournit en Hornberg depuis déjà quelques années, et son travail d'artisan à la confection des mouches artificielles me surprend vraiment. Il n'utilise que des matériaux de qualité et façonnent ses petits chefs-d'œuvre avec des mains patientes et habiles. A propos du modèle noyé, je préfère les ailes de mallard collées à l'arrière mais, en modèle mouche-vairon. Gérard Sylvestre laisse libre cette partie de la mouche qui peut ainsi mieux s'agiter dans l'eau, donnant un peu plus de vie à l'artificielle.

     Si je n'avais qu'une mouche, ce serait la Hornberg, en différents modèles et en différentes grosseurs, et je serais confiant de pouvoir ainsi leurrer toutes les espèces de poissons sportifs du Québec.

Parure

la Hornberg
Hameçon: Mustad #9672, 6 à 12.
Fil: Noir.
Corps: Fil de Mylar plat, lamé métallique argent.
Sous-aile: Hackle jaune, over: 2 plumes de poitrine de mallard.
Collerette: Un hackle grizzly et un hackle brun enroulé ensemble.
Joues: 2 plumes de coq de sonnera.
Tête: Laqué clair.

Référence

Texte & Photos : Jacques Gérome.

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