Truite de mer en Gaspésie, Comment s'y retrouver ? par Claude H. Bernard

     Comme vous le savez probablement, la truite de mer est en réalité un omble de fontaine (salvenilus fontinalis) anadrome. Les mouchetées québécoises sont très fréquentes dans les lacs sauvages ou ensemencés, dans les grandes rivières nordiques, les grandes rivières nordiques, dans les ruisseaux de montagne, les petites rivières forestières et de campagne, les rivières urbaines aménagées et les rivières coulant en mer à partir des bassins hydrographiques suivants:
Truite de mer en Gaspésie, Comment s'y retrouver ?
    1) Baie d'Ungava, James et d'Hudson.
    2) De la rivière Saguenay.
    3) De l'île Anticosti.
    4) De l'estuaire et du golfe Saint-Laurent.
    5) De la baie des Chaleurs.
 
L’état des stocks de truite de mer
 
     En Gaspésie, coulent 23 rivières dans lesquelles remonte l'omble de fontaine anadrome. Elles se déversent soit dans le golfe Saint-Laurent, soit dans la Baie des Chaleurs. La quantité de poissons présente dans ces rivières a beaucoup diminué depuis les 25 dernières années. Les études semblent pointer, comme responsables, les opérations forestières, les barrages sur certaines rivières et les prélèvements, soit par le braconnage, soit par la pêche récréative.
 
     Les coupes à blanc effectuées près des berges des rivières et les multiples chemins taillés en forêt permettent la fonte et l'écoulement rapide de la neige au printemps. Cette arrivée d'eau massive a arraché des berges, une multitude d'arbres, d'arbustes et de végétaux qui retenaient les sols et les sédiments. Ces sédiments ont colmaté une très grande quantité de sites de frai: moins de sites, moins de petites truites!
 
     De plus, les nombreux barrages aménagés sur plusieurs rivières, à la fin des années 1800 et au début des années 1900, sont également responsables de la diminution du nombre de poissons sur les sites de frai, en restreignant énormément la migration des géniteurs. Les prélèvements illégaux ont aussi eu leur impact, difficile à chiffrer, car les braconniers n'ont pas tous été pris sur le fait et condamnés.
 
     Par contre, les captures sportives de truites de mer sont dénombrables lorsque qu'elles sont faites en rivière, mais, les chiffres ne sont pas précis. Les captures en estuaire, à l'aval de la route 132, ne sont à peu près pas quantifiables, mais la logique nous dit que ces pêcheurs ne seraient certainement pas là, s'ils ne prenaient pas de truites! Malheureusement, ces truites ne sont jamais comptées. Il faudra peut-être en venir à des restrictions ou à des diminutions de limites de capture et même envisager la graciation (remise à l'eau) dans certains cas.

Techniques et tactiques

     On pratique la pêche à la truite de mer dans une rivière à saumon. Il faut obligatoirement un permis de pêcheur de saumon et un droit d'accès du gestionnaire de la rivière de votre choix: à moins de demeurer en Gaspésie près d'une de ces rivières, vous avez l'embarras du choix!
 
     Comme la pêche de la truite de mer en rivière est loin d'être aussi facile que la pêche en étang, il est préférable d'avoir un bon plan de match comprenant les éléments suivants:

Équipement : Des bottes, soit cuissardes soit pantalon. À l'achat, choisissez un pantalon imperméable micro-poreux qui respire et un imperméable en même tissu. Les autres vêtements doivent être adaptés aux conditions atmosphériques prévalant.

ANADROMIE

     Particularité qu'a la truite de mer de préférer l'eau saumâtre ou salée pendant la majeure partie de sa croissance, à cause de l'abondance de nourriture dans et près de l'estuaire de sa rivière. Après sa naissance en eau douce de rivière et après un certain temps de croissance - probablement deux ans - la truite dévale vers l'eau salée pour grandir. À maturité, un an plus tard, la truite de mer retourne vers l'eau douce en l'amont de sa rivière pour le frai. Cette maturité est atteinte entre les âges de deux à quatre ans, selon les sujets.
     Une courte canne de 7 à 8 pieds, si vous pêchez à bord d'un canot, ou une canne de 9 pieds, si vous pêchez à gué. L'important, c'est la grosseur de la soie. Plus elle est petite, plus vous devez travailler, mais plus vous avez de plaisir lorsque la truite est sur la ligne. Je suggère une canne pour soie 5 et le moulinet approprié. À vous de décider! Finalement, l'épuisette est toujours utile pour la maîtrise du poisson.

Repérage des sites de tenues des truites : Il vous faudra marcher dans les sentiers menant à la rivière, le long des berges et dans l'eau. Dans certaines rivières, le repérage se fait à bord d'un canot. Dans les deux cas, il faut repérer les endroits propices à la tenue de truites telles que:
     • eau profonde d'au moins un mètre.
     • eau légèrement moins rapide que la marche d'un homme.
     • concentration de l'eau en coulée, concentration de la nourriture en dérive, rechercher une ligne de brou concentrée.
     • couvert végétal, branches surplombant la coulée et la ligne de mousse.
     • arrachis de billots empilés les uns sur les autres.
     • seuil de fosse.
     • fosse lente à l'aval de sites propices à l'émergence d'insectes.

BESOINS DE LA TRUITE

- Eau froide (entre 13' et 18' C) et bien oxygénée.
- Nourriture en abondance (insectes, crustacés, poissons et mammifères).
- Protection contre les prédateurs (couvert végétal).
- Facilité de migration (libre circulation).
- Sites propices au frai (granulométrie, vitesse du courant, profondeur de l'eau).
Approche furtive : Les truites de mer sont souvent très farouches, un rien les épouvantes. Lorsque vous êtes à moins de trente mètres d'une tenue de truites, il faut absolument éviter les bruits de pas et les bruits de branches cassées. Évitez de faire débouler des cailloux, de faire des vagues en vous déplaçant dans l'eau. De plus, tenez-vous le plus bas possible. Il m'est arrivé de prendre plus de cinq minutes pour atteindre l'endroit où j'ai fait ma première présentation!

Choix de l'artificielle et la présentation : Suite à l'évaluation des lieux et de la situation, il faut maintenant faire le choix de l'artificielle et de la présentation, les deux allant de paire. La pointe de l'avançon devra être aussi fine que possible. Il faut laisser certaines mouches libres de dévaler à la vitesse du courant, après les avoir présentées, comme les mouches sèches imitant un insecte adulte. Il est donc nécessaire de faire une présentation avec une ligne flasque, non tendue, pour que la mouche puisse flotter sans drague alors que la soie se raidit. Souvent, cette technique nous force à lancer de façon perpendiculaire au courant, vers l'amont ou vers l'aval. Il faudra, à l'occasion, présenter la mouche sous les branches ou sous les billots, de façon à faire flotter la mouche au-dessus de la tenue des truites. L'habileté du pêcheur à contrôler les lancers horizontaux facilite énormément les présentations dans les endroits exigus.

LIVRÉE

     Lorsque la truite est en mer, sa livrée est d'apparence argentée. Son ventre blanc se confond avec la lumière du ciel et son dos foncé avec l'obscurité du fond. Ce camouflage en mer change au moment de l'arrivée de la truite en rivière. Sa robe s'adapte à l'environnement: le ventre demeure plutôt blanc, légèrement grisâtre, alors que les flancs et le dos deviennent plus foncés et colorés. Au moment du frai, les mâles s'habillent de façon éclatante, alors que les femelles conservent une livrée beaucoup plus sobre.

     Si la situation exige l'utilisation d'une mouche submergée tel un streamer, une mouche noyée ou une nymphe, l'habileté à lancer est tout aussi importante, Il faut bien juger la distance du lancer à exécuter de façon à déposer l'artificielle le plus près possible de la tenue de la truite, sans l'accrocher dans les obstacles de la berge.
 
     Lorsque la mouche est en dérive (mouche sèche) ou en parade (mouche noyée), soyez toujours attentif. Avec une mouche sèche, le pêcheur va ressentir et voir le gobage. Avec une mouche submergée, le pêcheur va plutôt ressentir la touche que la voir. C'est à ce moment précis que doit être effectué le ferrage.

HABITATS

     Répartition des truites de mer selon les saisons :
     - Printemps et été: surtout en estuaire et en rivière.
     - Automne: surtout à l'amont de la rivière.
     - Hiver: surtout à l'amont de l'estuaire.
Le ferrage, le combat et la maîtrise de la truite : Le ferrage implique le retrait de la mouche vers le pêcheur, par un geste de la main porteuse de la canne. Il s'agit d'élever ou de tasser la caune d'un côté ou de l'autre. Une fois le ferrage bien fait, le combat s'engage. Pour bien maîtriser votre truite, la canne doit être maintenue perpendiculairement à la ligne de tir, le poisson étant attaché au bout et elle doit absorber les coups et les tensions causés par la truite. La tension du frein du moulinet doit permettre la sortie de la soie lors d'une course, mais l'arrêter aussitôt la course terminée. Il est préférable de combattre le poisson à partir du moulinet.
 
     La pression de la canne sur la truite doit être proportionnelle à la grosseur du poisson. Restez dans l'eau jusqu'aux genoux, approchez la truite, guidez-la à l'épuisette avec la main porteuse de la canne, faites-la pénétrer et soulevez la puise. C'est le premier moment de grande satisfaction !
 
La graciation : Ici, vous avez une autre décision à prendre: soit la graciation, soit la conservation du poisson. Si vous graciez, c'est votre deuxième moment de grande satisfaction. Si vous conservez vos captures, éviscérez les poissons aussitôt tués et placez-les dans votre glacière. À défaut de glacière, couvrez les poissons de fougère mouillée ou d'une poche de jute mouillée. La satisfaction sera au rendez-vous quand vous mordrez dans votre première bouchée.

Le meilleur conseil

     Une dernière suggestion de la plus grande importance: lorsque vous connaissez peu, ou pas, la rivière ou le secteur de rivière où vous allez pêcher, engagez un guide! Il doit être très expérimenté, connaître sa rivière, en bonne forme physique, débrouillard, en mesure de vous aider dans vos déplacements, vos lancers, vos techniques et présentations. De plus, il portera vos effets et sera très habile avec le canotage. Il est certain qu'un guide de ce calibre coûte cher, mais assurément, il décuplera l'agrément et le succès de la journée de pêche.

À propos : A l'opposé du saumon, la truite anadrome s'alimente aussi bien en hiver qu'en été lorsqu'elle est en eau salée et elle le fait d'une façon opportuniste ou sélective :
     -Alimentation opportuniste: la truite gobe tout ce qui se présente dans son environnement.
     -Alimentation sélective: lorsque la nature offre une ou plusieurs émergences d'insectes, la truite semble se concentrer sur l'espèce d'éphémère la plus abondante. La truite ne prend rien d'autre que ce qui imite l'émergence en cours.

Note : Des études ont démontré que la truite de mer (anadrome) peut vivre plus longtemps (jusqu'à 7 ans) que la truite de lac (dulcicole), de 4 et 6 ans. La truite de mer peut donc atteindre une longueur et un poids plus importants. Une fois matures, les mâles peuvent frayer à tous les ans, alors que les femelles semblent occasionnellement passer une année.

Suggestions de mouches pour la truite de mer des rivières de Gaspésie

Mouches sèches imitatives d'insectes aquatiques:
-Adams #10 à 16.
-Blue winged olive #10 à 16.
-Haystack (couleur au choix) #10 à 14.
-Light Cahill #12 à 1 8
-Usual (couleurs au choix) #12 à 18
 
Mouches sèches imitatives d'insectes terrestres:
-Fourmis noires #10 à 16.
-Fourmis ailées noires #10 à 14.
-Sauterelles #6 à 12.
 
Mouches de surface imitatives de petits mammifères:
-Bombers à saumons (autre que blanc) #2 à 6.
-Souris brunes ou grises foncées #2 à 6.
 
Mouches noyées (émergentes):
-Aider #10 à 16.
 
Streamers imitatifs de petits poissons-appâts:
-Au bord'elle (8 pieds long) #2.
-Chabots #2 à 6.
-Grenade (6 pieds long) #2 à 6.
-Magog smelt #2 et 4.
-Taylor bugger #6 et 8.
-Woolly bugger olive, noir, brun #2 à 6.

     Suite à une excellente préparation mentale et physique, vous serez tout fin prêt à aller pêcher la truite de mer en Gaspésie car vous saurez comment vous y retrouver!

Références

» Texte et photos: Claude H. Bernard (2004).
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